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AFUP AFUP Day 2025 Baromètre Planète PHP PUFA
 

Mentors: super-héros ou super-vilains ?

Description

Développeuse junior, j’ai eu du mal à trouver ma place et faire mes preuves. Étudiante, vous m’aviez dit : “Deviens PO ou chef de projet !”. Je ne voulais pas d’un métier fonctionnel. Je me suis fixée un but, réussir là où vous, profs, maitres de stage, ne vouliez pas que j’aille. Des rencontres, cauchemardesques comme merveilleuses, tout au long de mon apprentissage, m’ont aidée à confirmer mon choix professionnel : être développeuse ! Comment mes mentors m’ont-ils guidée ? Je partagerai des actions et des comportements qui m’ont incitée à lutter pour atteindre mes objectifs. Vous aussi, vous avez le pouvoir de changer une vie !

Conférence donnée lors du Forum PHP 2023, ayant eu lieu les 12 et 13 octobre 2023.

Informations complémentaires

Vidéo

Le speaker

Pauline RAMBAUD

Pauline est développeuse back-end chez Bedrock, pleine de joie de vivre et de détermination ! Elle est débutante dans le monde de la conférence.

Transcript

[Musique] [Applaudissements] Bonjour à tous et à toutes.

Pour commencer je vais vous présenter un peu de contexte : j'ai 20 ans, j'entre dans une école d'ingénieur, je dois faire un stage de 6 mois.

Je me dis : "Chouette ! je vais prendre un stage un peu tech, avec du dev, du Java, de la programmation objet, je vais apprendre beaucoup, être accompagnée, ça va être génial !" En fait, non : c'était nul ! Déjà, j'ai pas eu de PC pendant 15 jours, on m'a donné des specs techniques imprimées sur papier, clairement mon tuteur était pas très sympa, on me donnait pas de travail, quand on m'en donnait, on résolvait les PR à ma place ou les MEP, plutôt que de me dire ce qui allait ou pas.

On m'a fait une proposition d'alternance, j'ai refusé bien sûr, parce que quand pendant 6 mois, ça se passe mal, vous avez pas de boulot, on vous parle pas, on vous explique pas et on vous fait pas avancer, ça va pas être bien pendant 2 ans.

Et puis je suis rentrée chez Bedrock, ça a beaucoup changé ma vie.

On a tous vécu cette situation critique, au cours de vos carrières, moi j'ai commencé par celle-là.

Ce sera peut-être pas la dernière, donc j'ai décidé de vous parler de ce sujet : "Mentors super-héros ou super-vilains ? Qui sont-ils ?" Ce sujet me tient à cœur parce qu'il m'a beaucoup impactée.

Disclaimer : je vous propose pas de solution miracle, je vous présente mon point de vue, mon expérience, et les choses qui selon moi ont été utiles dans mon mentorat.

Je suis Pauline, je travaille chez Bedrock, on vend des plateformes de streaming en marque blanche pour des clients comme M6.

Je suis développeuse back-end PHP, depuis peu je tripote un peu le Go, parfois je râle pour un peu tout et rien donc je suis un peu "grinch-esque".

Je suis aussi membre Duchess (un groupe de soutien entre femmes dans la tech) et également membre de l'AFUP à Lyon.

Au programme : je vais vous parler de mentorat mais pour dire quoi ? D'abord je vais faire un petit spinoff : "le mentorat, c'est quoi ?" Je parlerai ensuite du futur : "est-ce que je me vois mentor ?" Puis un peu d'actu : "à quoi ressemble ma vie et pourquoi c'est chouette ?" Et enfin, Bedrock : "qu'est-ce qui s'est passé ? quel a été le commencement ? quel a été mon cheminement de carrière ? comment j'en suis arrivée là ?" Le mentorat c'est une relation interpersonnelle : ça veut dire qu'il y a deux personnes, ça veut dire qu'il y a des interactions humaines, des caractères différents, que parfois on va vexer quelqu'un sans le vouloir, c'est aussi beaucoup de soutien, des échanges, de l'apprentissage.

Au final, c'est du don de soi et de son temps pour aider quelqu'un à s'épanouir et à se développer professionnellement.

Pour le futur : "Est-ce que moi je me vois comme un mentor ?" Pas trop pour l'instant : je me sens pas tellement les épaules, pas tellement prête pour ça, j'ai encore beaucoup d'expérience technique à acquérir, en tout cas c'est ce que j'aimerais.

Et le mentorat implique pas uniquement un stagiaire ou un alternant, ça peut être avec ses collègues sur un projet que vous maîtrisez un peu mieux, ça peut être sur plein de choses Aujourd'hui : concrètement, ma vie professionnelle c'est quoi ? Je suis dans l'équipe des calcifères chez Bedrock, une super équipe où je suis beaucoup accompagnée, on m'aide beaucoup, j'ai une manager géniale très à l'écoute, c'est une bonne entreprise, je suis très épanouie, je fais de la montée en compétence quotidienne et je m'en rends compte...

Bref, vraiment l'état d'esprit est sain et je suis bien.

Je prends beaucoup de recul et je me rends compte qu'en effet, le mentorat c'est vraiment à double sens : c'est pas uniquement un mentor expérimenté qui apprend à un mentoré, mais qu'en tant que mentoré, vous avez des leviers d'actions pour partager des choses.

J'espère que vous vous posez la question "comment, au début tu nous parles d'un stage foireux, nul, vraiment pas top, et là, tu es super contente : qu'est-ce qu'il s'est passé ?" Avant de le savoir, je vais vous présenter qui était Pauline en post-bac.

Qu'est-ce qu'elle voulait faire et quel était son rêve ? Son rêve c'était devenir médecin et c'était une blague de devenir ingénieur informatique et puis la médecine n'a pas voulu de moi, j'ai redoublé, échoué, et je suis partie en prépa en école d'ingénieur.

Alors je m'imaginais comme Jimmy Neutron, construisant des fusées, partir dans l'espace, j'étais astronaute ! En fait, c'est une prépa maths et mécanique, donc le seul informatique et les seuls algorithmes que j'aurais manipulés c'est MATLAB et j'aurais résolu des équations de matrice.

Je fais pas de programmation objet mais dans ma tête, quelque chose me dit : "Fais de l'info, ça va te plaire !".

Je fais un vœux et je vais en informatique à Polytech Lyon, et là, c'est la douche froide : je me ramasse ! J'ai jamais fait de programmation objet : on commence par ça.

On m'explique Java, l'héritage, toutes ces notions-là...

Je comprends rien, je suis en souffrance perpétuelle, je fais de l'assembleur, du réseau, je suis complètement perdue ! Je raccroche les wagons tant bien que mal et puis vient la fin de l'année, et c'est quoi ? "Pauline, tu redoubles" Punaise, ça, ça m'embête ! Comme au final, je redouble pour 4 heures par semaine sur un seul semestre, je me demande si je négocierais pas quand même un stage, histoire d'aller me confronter aux difficultés, et je prends un stage de dev, comme ça on tabasse les difficultés et on comble les lacunes, on y va ! Et c'est le fameux stage où ça se passe mal, c'est un choc ! J'en parle un peu autour de moi à l'école à des gens avec qui je m'entends bien, et au final à l'école, on va me dire quoi ? "De toutes façons, c'est pas grave, les femmes c'est pas technique, tu vas finir PO comme toutes les autres !" OK... et puis j'ai envie de vous grossir le trait : "De toute façon après une femme, ça fonde une famille, donc c'est pas grave !" Ah ben moi, je voulais faire du dev, je voulais être un gros barbu qui dev toute la nuit, et du coup, plot twist : je reste accrochée, je me dis "moi je veux être tech et ça va pas se passer comme ça !" Je reste sur mes appuis comme Antoine Dupont, j'arrive chez Bedrock grâce à une personne qui donne une conférence juste après, Benoît Viguier (donc merci Benoît !), et je passe de dernière de la classe à major de promo.

Pourquoi ? Déja l'approche de l'alternance va beaucoup m'aider, et je vais avoir un mentor qui a choisi.

J'ai pas été imposée, c'est vraiment le choix de Benoît, qui avait envie d'apprendre à quelqu'un de nouvelles choses.

Du coup, j'ai pris du recul, j'ai pensé à pourquoi j'avais vécu tout ça, qu'est-ce qui m'avait aidée, pas aidée, comment j'en étais arrivée à changer totalement de paradigme dans ma vie.

C'est parce que Benoît (qui est principal engineer back-end chez Bedrock à l'époque) me donne une chance : je vais construire ma première relation mentor-mentoré saine, où on va beaucoup discuter.

Je vais créer un outil de dette technique, de mesure de dette technique dans l'entreprise.

Il va y avoir beaucoup de discussions sur ce qu'on va apprendre, des discussions techniques, des discussions sur mes difficultés, sur la mauvaise organisation parce qu'en alternance, parfois on se laisse submerger par les cours et on se vautre totalement au travail, parce que on est en train de penser au projet à rendre hier...

On va aussi avoir une atmosphère bienveillante, il y a beaucoup de coopération.

Il y a aussi eu beaucoup de travail.

Vous allez me dire "Tu étais là pour ça, on a rien sans rien !" Mais j'ai quand même beaucoup donné de moi, donc petit appel aux mentors : si ça foire c'est pas que de votre faute ! J'avais aucune compétence technique ou très peu, donc des lacunes, mais vous arrêtez pas à ça dans votre choix aussi de mentoré.

C'est pas parce que quelqu'un n'a pas les compétences techniques qu'il va forcément être un mauvais mentoré et qu'il n'apprendra rien.

Au contraire on est peut-être encore plus motivé, on a encore plus envie de se donner les moyens.

Donc ne vous arrêtez pas à la compétence technique s'il vous plaît, parce que ça, ça, s'apprend.

On a beaucoup itéré, avec des difficultés croissantes, ce qui m'a permis de pas couler sous les nouvelles compétences, j'étais en alternance donc j'avais déjà des cours sur des domaines qui m'intéressaient pas forcément, où je devais apprendre de nouvelles choses.

Si en plus au travail, on me demande tout et n'importe quoi sur des choses que je sais pas faire, je vais me noyer, être complètement perdue, ça va être une souffrance et c'est pas le but.

Ça m'a permis d'avoir une acquisition des compétences progressive, et surtout durable parce que le fait d'avoir eu le temps d'apprendre et d'acquérir les compétences m'a permis d'évoluer sereinement.

Du coup à la fin de cette première itération avec Benoît, j'ai acquis les bonnes pratiques de l'entreprise, je suis à l'aise avec mon écosystème PHP et j'ai comblé en partie mes lacunes.

Donc c'est tout bénef' pour tout le monde.

Alors pourquoi cet homme qui avait un travail assez prenant a voulu s'embêter ? Parce que pour certains, c'est une charge, un alternant qui savait rien, qui était présente, avec de la bonne humeur et de la joie, mais qui techniquement... c'était un peu un frein.

Et son point de vue, c'est former quelqu'un avec les savoirs de l'entreprises, les bonnes pratiques...

Mais surtout, il m'a dit quelque chose qui a été un déclic pour moi : "j'avais le temps et j'avais l'envie de le faire".

Donc a contrario du premier stage où je me suis sentie comme un poids, un frein au tuteur, mais vraiment je l'embêtais : je lui posais une question, il soufflait...

là je me suis jamais sentie comme un poids malgré son plannning chargé de principal engineer, où il devait aller chercher des fuites mémoires dans le code, aider au monitoring de la plateforme...

j'ai jamais eu l'impression d'être un frein dans son travail quotidien, et ça c'est déjà un premier point.

En fait peut-être que pour être un super mentor, il faut être prêt, avoir choisi d'accueillir un alternant, avoir une idée de ce qu'on lui faire faire, parce que c'est un enseignement, vous êtes comme un professeur.

Un professeur prépare son programme, et un peu comme à l'école, vous avez un programme prédéfini et ça vaut le coup de passer un peu de temps à préparer en amont l'arrivée de votre alternant, définir des objectifs atteignables, modifiables, discutables...

Inclure votre alternant dans le choix des objectifs, c'est super, parce que ça va être adapté à lui, à ce qu'il fait.

Il faut que ce soit un accord avec le duo.

J'aime bien le mot "duo" parce que ça veut dire qu'il y a une complicité, quelque chose qui s'est créé, on est à l'aise l'un avec l'autre.

L'enseignement, c'est un métier : un professeur prépare son cours, pourquoi un mentor ne préparerait pas son mentorat ? Quand je suis arrivée, Benoît avait établi un plan d'action, on avait des étapes précises, une roadmap.

J'ai commencé par un script Vanilla PHP, c'était bien rigolo ! Puis on fait un script un peu plus avancé, puis utilisé un micro framework et enfin, on est passé sur Symfony, tout ça sur un an, pas du jour au lendemain.

Donc il a eu énormément de patience, pour me faire évoluer, pour m'emmener là où il voulait m'emmener.

Moi ça m'a permis de pas sombrer dès le départ : j'ai appris à résoudre des problématiques, sur mes façons de travailler, sur comment j'aimais travailler et surtout je me suis pas découragée.

C'est hyper important parce qu'on est jeune, on est plein de rêves, parfois on a été un peu déçu de nos expériences précédentes et tout ça permet de construire une confiance en soi, mais aussi vis-à-vis de notre mentor, de notre manager, etc.

On prépare son planning : ça veut pas dire "de 9h à 12h, tu travailles, de 12h à 13h tu manges, je t'ai préparé une petite gamelle au frigo !" Pas du tout ! Pas besoin que ce soit très détaillé et extravagant, c'est surtout accorder un peu de temps pour discuter, prévoir, expliquer.

Dites-vous que c'est ça le gros impact de prendre un mentoré avec vous : ça va vous bouffer du temps, et l'erreur qu'on peut potentiellement faire, c'est de minimiser le temps à accorder.

Donc qu'est-ce qu'on peut commencer à retenir pour devenir un bon mentor ? Etre prêt pour ce challenge, se poser 5 minutes et réfléchir à comment on veut mentorer, Je me suis posé une question obscure : quelles sont ses motivations ? Qui sont ces gens qui aiment aider les autres ? J'ai demandé à Benoît toujours, qui m'a dit : "moi, c'est transmettre ce qu'on aime et voir que ça fonctionne".

L'impact pour moi c'était d'avoir en face de moi quelqu'un de passioné qui aimait la qualité de code, forcément ça s'est ressenti, au fur et à mesure j'avais toutes les bonnes pratiques, j'avais envie de faire aussi bien que lui, que mon code soit chouette, j'avais envie que ça marche bien.

Donc ce que vous renvoyez, votre mentoré va l'absorber et s'en servir comme de l'énergie.

Il a dit quelque chose que je trouve très bien, qui est une belle position : "être expérimenté veut pas dire qu'on est capable de partager ses connaissances".

C'est pas parce que vous savez plein de trucs, que vous savez les expliquer et les transmettre à quelqu'un.

Et comme Benoît partait de ce postulat, j'étais à l'aise de lui dire quand je comprenais pas.

Je me rappelle d'un moment en deuxième année d'école d'ingé, et il m'explique les principes solides, les design pattern... et je comprends rien ! J'ai le regard vide, bovin, je comprends pas, je sais pas où il veut en venir, mais il s'est pas découragé, il a continué à m'expliquer, j'ai acquis vaguement le truc.

Et en fait c'est en dernière année d'école d'ingé où j'ai eu le tilt, quand on fait le vrai cours sur les design pattern, je me suis dit : "mais c'est donc ça ce qu'il m'expliquait il y a un an !" Comme il me l'avait expliqué, et que je l'avais mis en pratique sans m'en rendre compte ça m'a vachement aider à réussir mes partiels.

Tout ça pour dire que ce qui est trivial pour vous ne l'est pas forcément pour un autre, y compris pour votre mentoré.

Son petit instant chouchou, c'était les instants déclics (c'est lui qui les a appelés comme ça) c'est le moment où votre mentoré comprend ce que vous vouliez lui faire passer.

Je pense que c'est un moment chouette d'arriver à transmettre à quelqu'un quelque chose qui nous tient à coeur et par lequel on est passionné.

Vous l'aurez compris, depuis tout à l'heure je vous communique des choses, mais au final ce qui a fait que ça a réussi entre Benoît et moi, c'est qu'on a appris à se connaître, pas de façon très intime bien sûr, on était pas non plus les meilleurs copains à se checker quand on arrivait, mais j'étais suffisamment à l'aise pour lui dire quand il y a avait un souci, logistique ou personnel, parce que, oui, parfois il y a des impacts perso, quelque chose qui nous prend la tête, les cours nous encombrent, et dire qu'on est submergé par des doutes, les cours, la vie perso, quelque chose, ça aide parce que si la personne en face est plutôt réceptive, et que vous êtes dans une relation de confiance, elle va s'adapter, et ça va permettre de vous aider et d'être toujours dans le positif et avancer.

C'est aussi savoir comment travailler ensemble de façon efficace, comment on apprend, comment on partage, ce qui nous aide, si apprend vite ou pas...

C'est des choses qui peuvent aider le mentor comme le mentoré, et le signaler va aider et va rendre l'apprentissage beaucoup plus fluide.

Apprendre à se connaître permet une communication efficace, des quiproquos limités et tout se déroule facilement.

Apprendre à se connaître permet d'être un peu plus à l'aise pour poser des questions, si on sait que la personne en face est plutôt ouverte et sympathique, ça créé une atmosphère où on peut poser des questions de tout type.

Par exemple moi j'ai souvent le sentiment de poser des questions bêtes, pourtant elles sont si cruciales pour moi.

C'est souvent la question que j'osais pas poser qui était le petit caillou dans ma chaussure pendant une randonnée, le petit caillou qui fait mal, on sait pas où il est...

La plus petite chose en interrogation parfois, ça va être le déclic.

Donc si votre mentoré est à l'aise avec vous, il va pas avoir peur de se dire "c'est une question bête il va me prendre pour un neuneu".

Du coup là vous allez aider quelqu'un à progresser.

Poser des questions à son mentoré aussi : savoir comment il se sent, parce que c'est hyper important, savoir ce qui est bien, sur vous aussi, lui demander "qu'est-ce que tu trouves que je fais bien ?", reformuler ce que vous venez de lui expliquer en lui posant une question : "qu'est-ce que tu as compris, reformule-moi ça".

C'est la technique imparable pour savoir si quelqu'un a compris ou pas, et surtout si elle capte l'idée.

Poser des questions permet parfois de forcer la communication avec les gens timides, et surtout de savoir comment s'améliorer.

Pour communiquer il y a plusieurs types de choses : on peut faire des daily, morning, standup (une réunion rapide et quotidienne) pour savoir quelles ont été les difficultés, les points rencontrés, les déclics, etc.

et ça ouvre souvent la porte à des explications, à du pair et on avance tous ensemble.

Les "1 to 1", c'est un peu mon rituel chouchou, parce que j'ai souvent eu de la chance, je suis tombée face à des gens qui me donnaient des feedbacks et qui acceptaient d'en recevoir de ma part.

Donc dire "c'est pas ouf, ça m'a un peu frustrée, j'ai pas compris pourquoi tu m'as dit ça" c'est une chance énorme parce que vraiment, ça fait avancer, on fait avancer les gens et on se fait avancer soi-même.

Pouvoir dire à quelqu'un que peut-être selon nous il a un peu raté un truc...

Ce que j'aime beaucoup aussi c'est que ça permet de déterminer des actions et des objectifs adaptés, réalisables et qui vous font progresser.

Je pense que personne n'aime se fixer des objectifs qu'ils atteignent jamais, on aime tous avancer baby steps par baby steps, et c'est là qu'on se rend compte qu'on progresse et ça donne confiance.

J'ai eu beaucoup d'explications de la part de Benoît sur plein de sujets techniques, ça peut paraître long et une perte de temps, mais vous capitalisez sur le futur, parce que quelqu'un à qui on a pris le temps d'expliquer pendant une heure aujourd'hui, c'est une heure de gagnée demain parce qu'on a pas à lui réexpliquer parce que si on a pris le temps de reformuler, voir si elle comprenait ou pas, on avance et on évite la reproduction d'erreurs, les cercles vicieux, et surtout, on se rend compte qu'on n'a pas tous le même schéma mental, la même approche des difficultés, des définitions techniques, des concepts, etc.

Donc c'est hyper important et soyez pas blasée comme Isma, expliquez à votre Kronk.

Donc qu'est-ce qu'on peut retenir ? Toujours être prêt, ça change pas.

Communiquer et expliquer, ça c'est très important, ça m'a vraiment aidée d'avoir quelqu'un de patient en face de moi.

Je fais une petite minute de prévention : mon propos est a priori unilatéral, mais en tant que mentoré, on peut y mettre du sien aussi.

Je pense que j'ai beaucoup donné, je me suis donné les moyens, mais j'ai été aidée aussi.

Et surtout on travaille avec des humains, donc il y a des sentiments en jeu, et comme pour les schémas de pensée, on n'a pas tous les mêmes sentiments, on n'est pas tous sensibles de la même façon, donc ça va peut être demander de l'adaptation.

Par exemple j'aime qu'on me pousse à bout, dans mes retranchements, c'est dans ces moments-là que je donne le meilleur.

Mais si vous faites ça à quelqu'un de très stressé, très sensible, vous allez juste le mettre au fond du trou, potentiellement le mener à un burn-out, ce qui est pas top ! Donc en tant que mentor pensez un peu à la santé psychologique de votre mentoré, c'est hyper important.

Donc on s'adapte.

Vous vous doutez bien qu'il y a des flops, ça peut pas être si merveilleux.

Pour Benoît, ça a été sur la gestion du temps qu'il s'est foiré.

Le travail quotidien prend facilement le pas sur le reste, surtout quand on a un poste à responsabilités comme le sien.

Le mentoré aussi : ce qui m'a posé problème sur la gestion du temps, c'est savoir s'arrêter et avouer qu'on bloque.

On a toujours un peu cette pression d'avoir envie de réussir, montrer qu'on est capable, qu'on a mérité notre place, ce qui est un peu toxique peut-être...

Donc on a du mal à savoir s'arrêter, on est sur la même fonctionnalité depuis une semaine, on arrive pas à trouver, on fait des tests...

Parfois, se poser, dire "est-ce que tu as 5 minutes pour regarder ensemble, parce que là vraiment j'y arrive pas"...

C'est un équilibre précieux et fragile la gestion du temps.

Pour s'aider, on peut se guider, se donner des indications lors des points quotidiens : "aujourd'hui j'ai beaucoup de réunions mais tu peux me contacter à telle heure", ou on peut prioriser les messages avec des emojis pour qualifier l'urgence ou non.

On le fait dans l'équipe parce qu'on aime bien envoyer plein de messages à notre manager, mais parfois elle est en réunion, elle peut pas répondre et ça la stresse parce qu'elle voit une notif mais sans savoir si c'est urgent ou non, c'est une blague sur les girafes ou non.

J'ai découvert le "bring me a rock management", c'est-à-dire qu'on demande à notre mentoré de nous amener une pierre, il nous ramène une pierre ronde et on dit "moi je la voulais carrée..." du coup il ramène une pierre carrée, mais on la voulait un peu moins carrée...

Est-ce que vous pouvez lui reprocher de pas avoir fait son travail ? Non, mais vous lui avez pas donné assez d'indications pour répondre à votre besoin, donc vous pouvez pas vraiment vous plaindre de la façon dont le problème a été résolu, mais vous pouvez aider quelqu'un à améliorer cette réponse.

Je vous suggère une action : la revue de code.

C'était des moments que j'aimais bien aussi, on passait le code ensemble, et on souligne : "ça c'est bien parce que...", "ça ça pourrait être mieux comme ça", "ça c'est pas bon parce que...", on indique les "do" et "don't".

C'est hyper riche, vous avez une plue value, vous amenez quelque chose au mentoré, c'est pas juste "ça c'est nul, poubelle", "ça c'est ok"... enrichissez, expliquez.

Ça vous paraît prendre beaucoup de temps mais en fait pas tant que ça, et surtout vous allez tellement apporter à l'autre que c'est de l'économie sur le futur.

Faut voir un mentorat à long terme, c'est pas à court terme que ça se voit.

Après cette première année j'arrive dans ma première équipe, les Duncan, ils gèrent le backoffice, plus précisément le back du back.

On est sept, alors je stresse : "Et si je casse la prod ?", "Et si j'y arrive pas ?" "Et si on me trouve trop nulle ?", "Qu'est-ce que je vais faire après ?" "Je vais vraiment rater ma vie"... et en fait je me fais complètement des films.

Je suis accompagnée par le lead, et vous vous rappelez quand j'ai dit "on est des humains" ? Je découvre un collègue safe et moi je ratais toujours mes rebase, je les rate encore toujours je sais pas comment je me débrouille, et il y avait Stéphane qui m'aidait.

Et ça m'a aidée dans cette équipe parce que j'ai été intégrée, on m'a présenté de la documentation, les processus de l'équipe, j'étais un membre à part entière et c'est hyper important de se sentir acceptée.

Et discrètement ce que faisait le lead (je m'en suis rendue compte bien après), c'est qu'il me donnait des US de difficulté croissante, je l'avais pas vu venir parce qu'il les mettait comme ça, j'avais fini et le ticket apparaissait au bon moment pour moi.

Et ça m'a permis de me familiariser avec les outils, les process, avec l'équipe.

On encourage le Pair, peut-être que parfois votre mentoré va mieux s'entendre avec quelqu'un d'autre que vous et c'est totalement ok parce ça veut dire que lui ou elle aura un collègue safe pour l'aider.

Par exemple moi j'avais rebase n'importe quoi...

On est patient, on accepte les délais, on accorde une phase de découverte du ticket, des techniques...

Aujourd'hui encore quand je fais de la revue de code, je mets une plombe, et c'est ok pour ma manager parce qu'elle sait que ça me prend un peu plus de temps de la faire de façon rigoureuse, parce que j'ai un peu moins d'expérience.

Être patient, c'est dur mais vous verrez qu'on y arrive quand on y met du sien.

J'arrive en fin d'alternance, on peut penser que ça va être la fin du mentorat...

en fait non c'est juste que je découvre un autre aspect du mentorat, j'ai une manager d'exception, vous savez à quel point je l'aime je pense, et il y a deux autres gugus dans mon équipe, des barbus qui ont roulé leur bosse, qui ont 10 ans d'expérience, et on va former un trio et un duo, dont Pierre, ensemble on forme les "Pau-Pierre" (paupière) et il y a Nathan donc tous les trois on forme les "Pi-Pau-Than" (pipotant) ça nous fait rire et parce qu'on a créé une dynamique d'équipe, parce qu'ils sont expérimentés mais qu'ils ont l'envie de partager leur savoir.

Et c'est pareil dans l'autre sens : je leur présente des trucs de jeunes, des petites vidéo drôles, etc.

Parfois on a des conceptions d'esprit différentes, on peut s'amener beaucoup, on peut s'enrichir beaucoup.

Maintenant, je suis un peu à une autre step du mentorat, je suis plus dans l'étape franchir et éviter les obstacles, parce que je trébuche encore un peu et dans cette équipe, j'ai appris à accueillir les erreurs.

Ça veut pas dire les encourager, mais étudier pourquoi elles sont arrivées, est-ce qu'elles étaient évitables et si oui, comment.

Vous avez deux façons de gérer les erreurs : vous énerver, taper sur votre alternant (euh non, on tape pas sur Pompon !) ou expliquer, prendre du temps mais c'est pareil on capitalise sur l'avenir, parce que si vous expliquez pourquoi il s'est trompé aujourd'hui, demain il le refera pas normalement.

Grâce à une collègue j'ai découvert la notion d'"egoless programming" : ne pas faire aux autres que vous aimeriez pas qu'on vous fasse.

C'est agréable pour personne, même avec 25 ans d'expérience, d'être blâmé pour une erreur.

Ça arrive à tout le monde de se tromper, le but c'est d'essayer de comprendre et d'expliquer pourquoi c'est arrivé, comment ne pas le reproduire.

Donc on peut faire de la revue de code, de la mob review en live, je suis d'accord que ça fonctionne que s'il n'y a pas eu de mise en prod, malheureusement s'il y a eu une mise en prod un peu rapide, on peut faire un postmortem : on va étudier ensemble où, quand, comment, pourquoi.

Qu'est-ce qu'il s'est passé, qui sont les coupables, quelles ont été les erreurs, comment on aurait pu les éviter et surtout penser à la solution idéale, pour pas que ça se reproduise la prochaine fois.

Qu'est-ce que je dois mettre en place comme processus ? En tant que mentor vous pouvez vous poser la question : "Quels objectifs j'ai donné et quelles étaient mes indications ?" et là vous repensez au "Bring me a rock management" : mes indications n'étaient peut-être pas claires...

On peut aussi anticiper les obstacles : lire votre ticket avec votre mentoré, lui demander ce qui à son avis va le bloquer, demander du temps...

On donne des repères et on fixe des actions, parfois on essaie et ça marche pas, et puis grâce à une bonne communication au final, on s'évite beaucoup de soucis : quand ça a pas marché, ça nous permet de savoir pourquoi, on essaie de construire ensemble et de s'améliorer.

Aujourd'hui on a beaucoup de soutien dans cette équipe, on s'accompagne, j'ai pas toujours quelqu'un par mon épaule qui me dit "ça va ? tout se passe bien ?" on se place comme un accompagnant, on fait sentir sa présence et sa disponibilité, mais on n'intervient pas.

Il y a aussi beaucoup de soutien, on est un peu tous les cheerleaders les uns des autres.

Aujourd'hui par exemple j'ai reçu plein de messages de mes coéquipiers, qui m'ont dit "Tu vas tout déchirer !", même au sein de la boîte globalement, tout le monde est hyper positif, reboosté et je pense qu'on aime ça à tout âge, peu importe à quel stade de notre carrière on est, c'est toujours agréable de recevoir des mots positifs.

On s'encourage même pour les petits gestes, toujours un plaisir d'offrir et une joie de recevoir.

Donc, comment devenir un bon mentor ? On est prêt, on communique, on est patient, à l'écoute, on s'adapte, on accompagne, et au final pour moi il y a pas de super vilains, c'est des relations humaines, on a tous des atomes plus ou moins crochus avec certaines personnes, des façons d'interagir, certains caractères...

On peut tous être bon mentor à partir du moment où on s'en donne les moyens, qu'on accepte les erreurs et qu'on s'en sert pour s'améliorer, que ce soient des erreurs au niveau du code, des interactions...

Il faut accepter aussi que le mentorat c'est une relation humaine, avec ses qualités et ses défaut, il faut aimer l'humain pour être un bon mentor, il faut essayer, s'investir, accorder du temps, et si ça marche pas c'est pas grave, on peut réessayer plus tard et dans tous les cas, c'est une expérience qui vous fera grandir.

Ce que j'ai présenté, ça a marché pour moi, peut-être parce que je suis têtue et que j'ai la tête dure mais tout le monde est différent, et vraiment j'insiste : adaptez-vous s'il vous plaît.

Si vous voyez que ça colle pas avec votre mentoré, parlez-en, essayez de lui trouver un autre tuteur, parlez-en avec lui ou elle pour savoir ce qu'il s'est passé, pourquoi ça coince... ça pourra aider.

S'il vous plaît sauvez une dev ! Aidez vos mentorés à développer leur potentiel, c'est important et vous sauverez certainement une carrière, peut-être même une personne.

Je me suis inspirée de la conférence de Daniel Garnier Moiroux qui est pleine de pédagogie et bienveillance, vous pouvez la retrouver il l'a donnée au MIXIT 2022, c'est vraiment chouette.

Je vous remercie pour votre attention et je vous souhaite un excellent forum PHP.

[Applaudissements] Merci beaucoup Pauline il nous reste 7 minutes si vous avez des questions.

Merci pour cette présentation, tu nous a dit à la présentation des speakers qu'on venait pour nous dire pour le long coup des girafes...

Et du coup pourquoi les girafes ont-elles un long coup ? Parce qu'elle puent des pieds ! La réaction est mitigée...

Merci pour la présentation, c'était très enrichissant.

Est-ce qu'à l'avenir ça t'a donné envie de devenir mentor tout de suite ou peut-être d'attendre encore un peu ? C'est quelque chose qui me tiendrait vraiment à cœur et qui me ferait très plaisir, aujourd'hui je me suis rendue compte que j'étais peut-être un peu mentor de certains de mes collègues parce que je suis référente sur certains projets, donc j'ai plus de connaissances, donc parfois quand ils sont bloqués on en discute.

Je vois que j'ai appris plein de choses et c'est un peu à moi de le retransmettre Parfois j'ai moi aussi la sensation de "En fait tu as pas compris ce que je t'ai expliqué ?" et du coup ça me remet en jeu, c'est l'autre vision de la partie, c'est comment on interagit avec quelqu'un et c'est hyper enrichissant.

Le mentorat ne s'arrête pas à une relation alternant ou stagiaire et quelqu'un d'expérimenté qui se pose comme un tuteur.

Merci pour cette super conférence.

Une question par rapport au réseau : existe-t'il aujourd'hui des réseaux, (je sais que l'AFUP par exemple a un programme de mentorat, je le rappelle pour les gens qui savent pas et qui auraient pas vu la keynote hier) mais est-ce qu'il existe aussi d'autres réseaux pour d'autres écosystèmes, d'autres langages, ou par exemple même au sein des Duchess, où on pourrait faire des rencontres "un mentor presque parfait" ou des choses du genre, pour que des stagiaires / alternant.e.s trouvent des mentors, pour faciliter justement la connexion des atomes crochus dont tu parlais ? Puisque des mentors qui veulent mentorer, qui sont grosses barre dans une cave, ont peut-être moyen de trouver chaussure à leur pied, et à l'inverse des des extravertis aussi mais pas sur les mêmes modèles.

Est-ce que tu as connaissance de ce genre de réseaux ? Par exemple sur les Duchess le marrainage se fait beaucoup, il y a aussi une communauté féminine à Lyon sur de l'informatique, où on fait passer beaucoup de tuyaux comme ça, beaucoup d'offres de stages, où il y a beaucoup de communication.

Après c'est passer des entretiens sur les canaux classiques comme LinkedIn, mon CV a atterri là parce que untel a repartagé et puis ça a fini sur un bureau chez M6.

J'ai pas en tête de réseau vraiment spécifique mentorat dans l'IT, comment faire avec "Le manuel du mentor", "Le manuel du mentoré", mais ça peut être une initiative sympa ! La première chose que tu dis c'est qu'un mentor doit être prêt, mais quand on est pas forcément certain de ses compétences, qu'on a envie d'aider mais qu'on est pas forcément assis sur ce qu'on fait, est-ce que tu penses qu'on doit vraiment être prêt ou qu'on peut se lancer sans forcément être prêt et apprendre sur le tas ? "Être prêt" c'est peut-être pas le bon choix de mot, c'était plus "choisir d'aider quelqu'un et de le mentorer".

Il y a pas besoin d'avoir un certain socle technique, c'est un peu du cœur, il faut se sentir prêt au sens de caractère : "j'ai envie d'aider quelqu'un", et puis je pense qu'il faut se lancer, essayer, et puis on voit comment ça se passe, et normalement ça se passe pas trop mal si on arrive à communiquer. Donc lance-toi si tu as envie d'aider quelqu'un ! Merci pour la conférence. Je me demandais s'il y avait d'autres mentorés dans ton entreprise, et s'il y avait pas d'autres mentorés est-ce que tu as échangé avec tes collègues de fac est-ce que ça t'a aidé d'échanger avec eux potentiellement sur l'aide apportée, comment ça se passait, des choses comme ça ? J'en ai discuté beaucoup avec mes camarades de promo, qui avaient des mentors vraiment assez différents : le mentor "je te mets la pression, faut que tu sois mon champion, faut que tu contribues, faut que tu fasses des trucs de dingue !", le mentor "je-m'en-foutiste, c'est pas top ce que tu as fait, envoie-moi la prochaine fois" tu envoies et tu as pas de retour et puis on te dit "c'était un peu nul" donc pas terrible...

Au final moi je me suis trouvé vachement bien lotie, on discutait, on partageait : "ah ouais mais vous discutez de ça ?", "Mais il t'a aidé pour les cours ?" Bah oui, c'est une discussion technique, je fais des études techniques donc voilà...

Chez Bedrock j'ai été une des premières alternantes du début, donc au back j'étais toute seule, il y en avait un au front, et sur le Slack de l'entreprise on avait justement un chan pour tous les alternants aujourd'hui, j'en fais plus partie donc je saurais pas dire s'il est encore actif ou pas, donc on se crée des petites communautés de soutien à notre échelle parce que souvent quand on est en alternance il y a aussi le reste de la promo, donc on arrive à échanger là-dessus et je pense que c'est important.

Merci beaucoup Pauline. Merci à vous.

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